Compil’ Veille juridique 2019

Agents contractuels

FPT - Titulaire à temps partiel

Un fonctionnaire territorial à temps partiel a priorité sur un contractuel.

Un professeur territorial d’enseignement artistique occupait un poste à temps non complet à raison de 13h par semaine. A plusieurs reprises il demande un poste à temps complet (soit 16h par semaine) ce qui lui a été refusé. Le Conseil d’Etat en application des dispositions de la loi du 26 janvier 1984 précise que lorsque des fonctionnaires de catégorie A ont été nommés dans des emplois permanents de professeur d’enseignement artistique à temps non complet, leur employeur ne peut, pour assurer des heures d’enseignement auxquelles ces fonctionnaires se sont portés candidats afin d’exercer leurs fonctions à temps complet, recruter un agent contractuel, que si les besoins du service ou la nature des fonctions en cause le justifient. Or, lors de la période en cause, la communauté avait recruté un contractuel pour exercer, huit heures par semaine, des fonctions de professeur d’enseignement artistique dans la même discipline que le requérant. Conseil d’Etat, 19 décembre 2018, Communauté d’agglomération Toulon-Provence-Méditerranée, n°401813

Indemnisation chômage – Renouvellement CDD

Un agent public contractuel qui refuse, sauf motif légitime, le renouvellement d’un CDD n’a pas le droit aux indemnités chômage sauf s’il est salarié de droit privé.

Employée en contrat d’accompagnement dans l’emploi puis en contrat unique d’insertion (CUI), la requérante avait refusé le renouvellement de son contrat pour trois mois. Du fait de ce refus, le CHU de Limoge (employeur) avait rejeté sa demande d’allocation pour perte d’emploi. La cour relève que le règlement général annexé à la convention du 19 février 2009 relative à l’indemnisation chômage dispose que sont involontairement privés d’emploi ou assimilés les salariés dont la cessation du contrat de travail résulte de la fin de leur CDD dont notamment les contrats à objet défini. Un agent public contractuel qui refuse, sauf motif légitime, le renouvellement d’un CDD n’a pas droit aux indemnités chômage (Conseil d’Etat 13 janvier 2003, n°229251). Mais il n’en va pas de même pour un salarié de droit privé. Cour de Cassation, Chambre Sociale 16 janvier 2019, n°17-11.975

Carrière - Gestion

Contractuels de l’Education Nationale : pas d’indemnité forfaitaire pour sujétions spéciales avant la rentrée 2016.

Le requérant, enseignant contractuel, a demandé au tribunal administratif d’annuler la décision par laquelle le recteur d’académie a rejeté sa demande tendant au versement de l’indemnité forfaitaire pour sujétions spéciales, pour les années 2011-2012 et 2012-2013. Le TA a rejeté sa demande en considérant qu’aucun texte ne régissait la situation des agents non titulaires des établissements d’enseignement général, technique et professionnel au regard de cette indemnité. Autrement dit, dans le silence du contrat, il convient de se reporter aux dispositions de portée générale, lesquelles ne prévoyaient pas d’indemnité forfaitaire pour sujétions spéciales au bénéfice des agents contractuels. La CAA confirme cette solution et précise que ce n’est qu’à compter du décret du 29 août 2016, applicable au 1er septembre 2016, que le bénéfice de cette indemnité a été étendu aux agents contractuels. Les dispositions de ce décret ne pouvaient donc être invoquées pour les années précédentes. Cour administrative d’appel, 29 mai 2018, n°16BX01039

Requalification des contrats aidés en CDI : Des précisions sur l’obligation de formation de l’employeur…

Sur le fondement de la méconnaissance par l’employeur de son obligation de formation, une EVS recrutée par un collège par quatre contrats (d’avenir puis contrats uniques d’insertion), demandait la requalification desdits contrats en CDI. L’article L.1245-1 du code du travail prévoit qu’est réputé à durée indéterminée tout contrat de travail conclu en méconnaissance des dispositions des articles L.1242-1 à L.1242-4. L’article L.1242-3 prévoit ainsi que les contrats aidés peuvent être conclus pour une durée déterminée sous réserve qu’ils remplissent les conditions de formation et d’accompagnement prévues par la législation correspondante. La Cour de Cassation rejette cette demande. D’une part l’employeur avait satisfait à son obligation de formation du seul fait que chacune des conventions tripartites prévoyait un référent (le principal du collège). D’autre part, la formation délivrée en interne par une initiation à l’informatique avait permis à l’intéressée d’acquérir des compétences, détaillées dans l’attestation délivrée. L’employeur n’est pas regardé comme satisfaisant à son obligation de formation lorsqu’il ressort de la convention tripartite que celle-ci n’a jamais prévu autre chose qu’une aide à la prise de poste et une adaptation au poste de travail, par formation en interne. Cour de cassation, Soc, 28 juin 2018, n°15-19.007

●…et sur le juge compétent pour en tirer les conséquences indemnitaires.

La requérante, employée par un lycée, avait demandé et obtenu la requalification en CDI de plusieurs contrats successifs pour manquement de l’employeur à son obligation de formation. Elle s’est vu octroyer des dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat. Sa demande d’indemnité de requalification est en revanche rejetée, comme portée devant une juridiction incompétente ; devant le juge administratif elle demande la condamnation de l’Etat à réparer son préjudice de précarité. Le Tribunal des conflits précise que la compétence du juge judiciaire pour tirer les conséquences indemnitaires d’une requalification liée au manquement de l’employeur vaut « y compris » lorsque ces derniers portent sur les conditions dans lesquelles les contrats ont été conclus et renouvelés. Les conséquences à tirer de la requalification des contrats aidés en CDI lorsque ceux-ci ont été conclus avec une personne publique gérant un service public administratif ont soulevé de nombreuses difficultés quant à la détermination de la juridiction compétente. Le Tribunal des conflits avait fixé le cadre en la matière dans une jurisprudence de 2010 : s’il est quelques cas qui impliquent la compétence de la juridiction administrative, c’est en principe au juge judiciaire qu’il appartient de se prononcer sur l’indemnisation des conséquences de la requalification du fait des manquements de l’employeur. L’indemnisation des conséquences du préjudice de précarité, en conséquence d’éventuels abus de l’Etat, n’y échappe pas. Tribunal des conflits, 12 novembre 2018, n°4136

Ne pas renouveler un CDD à seule fin d’éviter sa transformation en CDI est illégal.

Un agent contractuel est recruté en novembre 2010 par le CNRS, puis en 2014 par une université, à chaque fois sous la forme de CDD au profit d’un même laboratoire scientifique. L’université lui signifie sa volonté de ne pas renouveler son contrat au-delà de son terme, prévu le 31 août 2016. Le tribunal administratif fait droit à la demande d’annulation de cette décision, aucun motif tiré de l’intérêt du service n’étant de nature à la justifier. Le refus de renouvellement répond à une stratégie illégale de l’université visant à ce que celle-ci, en évinçant momentanément le requérant, ne se trouve pas tenue de lui proposer un CDI.

Dès lors que le requérant exerçait des fonctions similaires depuis 2010, il pouvait être regardé comme dépendant d’un même employeur au sens de la disposition qui prévoit qu’au-delà d’une période de travail de six ans sous la forme d’un CDD, le CDD d’un agent ne peut être renouvelé que sous la forme d’un CDI. Si la décision de non renouvellement de son contrat est annulée, le requérant n’obtient pas du juge qu’il enjoigne à l’université de le réintégrer. Dès lors celle-ci n’a pas été tenue, en soi, de renouveler son contrat, et avait même manifesté la volonté contraire. Reste pour lui la modeste perspective d’une action indemnitaire et d’une réparation de son préjudice moral. TA de Montpellier, 9 novembre 2018, n°1605073.

Les obligations des enseignants contractuels changent quand ils passent en CDI.

Une enseignante contractuelle voit ses contrats renouvelés chaque année depuis 2000. En 2012, en application de la loi Sauvadet, son contrat est transformé en CDI, mais au lieu de prévoir une affectation dans un établissement, le contrat stipulait que « l'intéressée exercerait ses fonctions dans le ressort de l'académie de Grenoble et que son affectation serait déterminée et modifiée par le recteur compte tenu des besoins du service ». L’intéressée refuse ce qu'elle considère comme « une modification substantielle de son contrat » et demande à bénéficier de l'allocation d'assurance liée à la perte d'emploi. Le recteur refuse, la procédure arrive devant le Conseil d'Etat qui donne tort à l'enseignante. Les hauts magistrats énoncent que l’agent public « qui refuse la transformation de son CDD en CDI, ne peut être regardé comme involontairement privé d’emploi, à moins que ce refus soit fondé sur un motif légitime ». « Un tel motif peut être lié notamment à des considérations d’ordre personnel ou au fait que le contrat ait été modifié de façon substantielle par l’employeur sans justification ».

Les agents publics ont droit à l’allocation d’assurance chômage s’ils ont été « involontairement privés d’emploi » (articles. L. 5422-1 et L. 5424-1 du Code du travail). Le Conseil d’État retient que le refus de l’enseignante de conclure le CDI qui lui a été proposé, « motivé par la modification substantielle de son contrat, ne peut être regardé comme reposant sur un motif légitime ». En conséquence, « elle ne peut être regardée comme involontairement privée d’emploi et ne saurait, par suite, prétendre au bénéfice de l’allocation d’assurance pour perte d’emploi ». Conseil d’Etat, 8 novembre 2019, n° 408514

Requalification de vacations en contrat d’agent contractuel.

La requérante, agent d’entretien, a été recrutée par le rectorat à 29 reprises pendant trois ans. Employée la première année en qualité d’agent contractuel, elle l’a été, les deux années suivantes, en qualité d’agent vacataire. Elle demande la requalification de ses vacations en contrats d’agent non titulaire et la transformation de ses actes d’engagement en CDI. Le tribunal administratif a fait partiellement droit à sa demande : dès lors que les fonctions de l’intéressée, exercées de manière ininterrompue, correspondaient à un besoin permanent, la requérante devait être regardée, pour la période considérée, comme un agent public non titulaire ; en revanche les conditions d’une transformation en CDI n’était pas réunies. Le vacataire, qui est censé n’effectuer qu’une prestation de service, est recruté pour exercer un acte déterminé répondant à un besoin ponctuel de l’employeur public. Il a le droit à la requalification de ses actes d’engagement en contrats d’agent non titulaire s’il apparaît qu’il a occupé de manière continue un emploi correspondant à un besoin permanent de la collectivité. Les vacataires, dont la situation juridique est très précaire, n’ont quasiment aucun droit. Le décret du 17 janvier 1986, applicables aux agents contractuels, comporte un certain nombre de garanties pour ces derniers, notamment en termes de protection sociale, ne s’applique pas « aux personnes engagées pour une tâche précise, ponctuelle et limitée à l’exécution d’actes déterminés » (article 1). Tribunal administratif de Toulouse, 21 décembre 2018, n°1605881

Licenciement – Non-renouvellement d’engagement

Chargé d’enseignement, des contrats conclus à durée déterminée.

Ayant dispensé des enseignements pendant vingt-cinq ans au sein du département de langues étrangères appliquées (L.E.A.) d’une université sur le fondement de CDD conclus chaque année, la requérante avait demandé, en vain, au président de cette université de transformer son CDD en CDI. Par ailleurs, la directrice du département de L.E.A. avait fait savoir à la requérante qu’aucun enseignement ne lui serait confié pour l’année universitaire suivante.

S’agissant du refus de reconnaître à la requérante un droit au bénéfice d’un CDI, le Conseil d’État a tout d’abord rappelé les dispositions de l’article L. 952-1 du code de l’éducation qui prévoient notamment que les chargés d’enseignement « (…) sont nommés pour une durée limitée par le président de l’université, sur proposition de l’unité intéressée, ou le directeur de l’établissement (…) ». Le Conseil d’État a jugé qu’il résulte des dispositions de cet article et de celles du décret n° 87-889 du 29 octobre 1987 relatif aux conditions de recrutement et d’emploi de vacataires pour l’enseignement supérieur que « les contrats passés par les universités en vue de recruter des chargés d’enseignement sont conclus pour une durée déterminée, le cas échéant renouvelable ». Tirant les conséquences de ce que la requérante n’était ni titulaire d’un contrat à durée indéterminée, ni réputée titulaire d’un tel contrat, mais seulement bénéficiaire d’un contrat limité à l’année universitaire en cause, le Conseil d’État a jugé que la cour n’avait pas commis d’erreur de droit en retenant que la décision de ne pas confier d’enseignements à l’intéressée pour l’année universitaire suivante ne constituait pas une mesure de licenciement mais seulement un refus de renouvellement de son contrat à durée déterminée.

Enfin, après avoir rappelé la jurisprudence bien établie en la matière selon laquelle « un agent public qui a été recruté par un contrat à durée déterminée ne bénéficie pas d’un droit au renouvellement de son contrat ; (…) toutefois, le refus de renouvellement d’un tel contrat ne peut se fonder que sur un motif tiré de l’intérêt du service », le Conseil d’État a jugé qu’aucun élément sérieux n’était, en l’espèce, de nature à établir l’existence d’un intérêt du service justifiant le maintien de l’enseignement de la requérante. Conseil d’Etat, 12 septembre 2018, n° 400453

Rémunération

Pas d’obligation générale de revalorisation régulière.

Même si les administrations font souvent référence aux grilles indiciaires des agents titulaires dans les contrats des agents contractuels pour fixer leur rémunération, le juge précise que, dans le silence des textes, elles ne sont pas tenues de faire évoluer la rémunération des agents non titulaires en fonction de ces grilles. Il existe cependant quelques garanties.

En effet, le dernier alinéa de l’article 1-3 du décret du 17 janvier 1986 impose une réévaluation au minimum tous les 3 ans de la rémunération des agents en CDI et l’étend aux agents recrutés en CDD, au vu notamment des résultats de leur évaluation ou de l’évolution des fonctions, sous réserve que cette durée ait été effectuée de manière continue et avec le même employeur. Le Conseil d’État estime qu’une augmentation de la rémunération est possible dans la mesure où elle constitue la contrepartie d’une évolution des tâches, de la qualification ou de l’expérience professionnelle et que les augmentations sont possibles à la condition qu'elles n'interviennent pas à un rythme régulier prédéterminé, qui aurait pour conséquence de mettre en place un système de carrière au profit d'un agent non titulaire. Il convient de rappeler que le Conseil d’État a indiqué dans ses avis du 30 janvier 1997 et du 30 septembre 2014 « qu’aucun principe général du droit impose de faire bénéficier les agents non titulaires de règles équivalentes à celles applicables aux fonctionnaires ». Le pouvoir réglementaire ne pourrait, transposer purement et simplement aux contractuels des règles statutaires qui, élaborées pour des corps de fonctionnaires de carrière recrutés en principe sur concours, ne sont pas adaptées à la spécificité des conditions d’emploi d’agents contractuels recrutés dans le cadre et pour les besoins définis par le législateur (avis du 30 janvier 1997). Si une augmentation de la rémunération est décidée, elle doit rester dans des proportions raisonnables et sera motivée par le changement d'un des critères de rémunération : par exemple des responsabilités plus importantes ou un accroissement de qualifications professionnelles de l'agent. La réévaluation ne doit pas être excessive, sous peine de constituer une modification substantielle et, ainsi, de donner naissance à un nouveau contrat, avec toutes les conséquences qui en découlent.